Florian Daguin & Gilles Feuermann

Propos recueillis par Séphora Talmud. Photos prises par Elodie Daguin.

Florian Daguin, Gilles Feuermann

Florian Daguin est architecte, Gilles Feuermann est directeur artistique. A l’aube de la trentaine, les deux hommes se racontent leurs parcours créatifs emplis de curiosité, et échangent sur ces passions qui leur servent aujourd’hui de métiers. Les visions de ces deux créatifs inspirés et inspirants, qui travaillent souvent dans l’ombre, méritent bien un coup de projecteur !

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Gilles Feuermann : Bordeaux

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Florian Daguin, Gilles Feuermann

Florian Daguin : A toi l’honneur !

Gilles Feuermann : Merci. Je m’appelle Gilles, j’ai 29 ans, je suis directeur artistique chez StudioM, qui fait partie de GroupM France, une grande agence média. Je suis en transverse sur tous les sujets de ses comptes médias, qui sont divers et variés ; je fais du web, du print et de la vidéo.

Florian Daguin : Cool. Et avant ça, tu as fait quoi ?

Gilles Feuermann : Quand j’étais plus jeune, je voulais travailler assez rapidement. J’ai fait un BEP électronique, puis un Bac Pro, dans lequel un prof d’arts plastiques m’a encouragé à me plonger dans l’Art, le graphisme, les logiciels, qui me passionnaient. Mes parents m’ont suivi. On a trouvé une école à Strasbourg, où j’ai appris le graphisme pendant 3 ans. Je suis arrivé à Paris à 22 ans.

Florian Daguin : C’est satisfaisant. T’as rebondi au fur et à mesure.

Gilles Feuermann : Oui, je me suis épanoui dans le graphisme et la direction artistique. Ca fait plus de 6 ans que je travaille et que ça me plait. J’ai commencé en stage, en contrat professionnel, puis j’ai gravi les échelons, de graphiste à des postes de plus en plus importants. Je travaille principalement avec des graphistes, retoucheurs, photographes ou illustrateurs, souvent freelances.

Florian Daguin : Tu montes ton équipe en fonction des projets ?

Gilles Feuermann : Exactement. On travaille avec tous les corps de métiers. Le métier de directeur artistique permet de tout coordonner. Bien sûr, je ne fais pas que donner des directives ; j’assemble le tout pour en faire quelque chose de joli. Et toi, quel est ton parcours ?

Florian Daguin : Je m’appelle Florian, j’ai 28 ans, je suis arrivé de ma Bourgogne natale à Paris à 18 ans pour suivre des études d’architecture pendant 5 ans. J’étais hyper épanoui, contrairement au lycée, où j’étais un élève moyen de série Scientifique. J’avais l’impression qu’architecte était un métier d’élite, pas fait pour moi. Mais mes parents m’ont poussé à passer des concours dans des écoles et j’ai réalisé que c’était faisable. Mais il ne faut pas confondre études et métier. Tu passes 5 ans à apprendre des trucs, et quand tu arrives dans les premières réunions de chantier, tu ne comprends rien.

Gilles Feuermann : Oui, ça change beaucoup. Tu as plus de pression, aussi.

Gilles Feuermann, Florian Daguin

Florian Daguin : Et c’est bien. Tu te dis que tu vas apprendre toute ta vie, finalement. Cela fait désormais 4 ans que je suis architecte dans une agence de 7 personnes, qui fait du logement, essentiellement de la commande publique. 70% de l’activité est basée sur de la réhabilitation de grands ensembles, ce qui comprend entre 150 et 250 logements. On travaille jusqu’à Orléans. Le reste sont des opérations de logements neufs dans Paris sur des dents creuses (une parcelle vide entre deux bâtiments), mais c’est de plus en plus rare et compliqué.

Gilles Feuermann : Pourquoi ? J’imagine que tu n’as pas trop de place, donc t’es obligé de réfléchir à la structure et à ce que tu vas y faire.

Florian Daguin Sur les dents creuses, on sort entre 5 et 15 logements, qui sont très complexes. Avec toutes les règles d’urbanisme, ça contraint l’opération. On est de plus en plus en concurrence avec d’autres architectes sur ce type de projets, aussi. Je me rends compte que dans mon travail à la fois créatif et répétitif, c’est la diversité du quotidien qui me plaît.

Gilles Feuermann : Moi aussi, c’est exactement ça. Je répète les choses, mais je ne bosse jamais sur les mêmes sujets.

Florian Daguin : Et sur le papier, des opérations qui sont similaires peuvent avoir des contraintes différentes, qui font que tu ne vas pas mener le projet de la même manière. Ce qui me plaît aussi, c’est la dimension sociale de nos projets. On fait beaucoup de logements sociaux et on intervient dans des immeubles occupés. Les personnes sont chez elles quand on fait les travaux. Il y a une vraie attente du locataire sur les réhabilitations de grands ensembles et ce n’est pas forcément facile.

Gilles Feuermann : Ha oui, donc tu as une contrainte en plus.

Florian Daguin : La contrainte est surtout pour les locataires. Mais globalement, 95% du temps, les gens sont contents à la fin. Cette année, cela fait 10 ans que je suis à Paris. J’aimerais partir en province, mais en gardant un accès direct à Paris. Ce qui me manque ici, c’est l’espace, la végétation, le silence, le noir.

Gilles Feuermann : J’ai l’impression qu’à Paris, tout est compliqué. Il y a plein de choses à faire, tu as des journées hyper chargées, t’enchaînes. Faut se motiver. Alors que de vivre dans une ville à taille humaine, tu maîtrises mieux, tu prends le temps de faire les choses, tu es moins frustré.

Florian Daguin : Tout va très vite à Paris. Le rythme de vie est éreintant.

Gilles Feuermann : Quand je suis arrivé à Paris la première fois, je faisais 2 heures de trajet quotidien sur une ligne de métro pourrie pour aller au travail et ça m’a vacciné. J’ai déménagé, mais au bout de 6 mois, j’ai pris un scooter, c’est plus simple et pratique, je me déplace beaucoup. Le vélo, je l’utilise le weekend, par plaisir ; tu peux aller ailleurs.

Florian Daguin : J’ai traversé la France en vélo. Je déteste courir, donc le vélo, c’est un sport de compromis et tu vois des paysages.

Florian Daguin, Gilles Feuermann

Florian Daguin : Et il y a d’autres milieux dans lesquels tu te sentirais bien ? Parce que moi j’ai l’impression que je pourrais explorer 15 autres métiers (comme la mécanique, la cuisine) et je serais aussi épanoui que dans mon métier d’architecte.

Gilles Feuermann : Je suis passionné de sports extrêmes, c’est un milieu qui m’attire énormément. Peut-être plus du côté de la photographie que de la pratique en tant que telle. Un peu comme Les Others, qui est un collectif qui a lancé un magazine avec des photos de voyages sublimes. Je prends des photos tout le temps. T’as des sources d’inspiration, toi ? Je suis passé devant Bercy, il y a ces nouveaux quartiers qui sont fous.

Florian Daguin : L’école que j’ai faite et mon travail sont dans ce quartier-là. En 2007, il y avait 1/3 du quartier qui était construit. Plein de choses ont poussé, c’était hyper formateur d’être témoin de ça. Chaque bâtiment a son intérêt. C’est plus sur l’urbanisme qu’il y a des choses à redire. Tu es passé là-bas un dimanche ? C’est mort, c’est que du bureau.

Gilles Feuermann : L’architecture est dingue. Mais oui, il n’y a pas de vie de quartier.

Florian Daguin : Concernant les inspirations, je n’idolâtre personne. Je préfère l’architecture japonaise, plus minimaliste, plus sobre, plus pure. Ca fait du bien. Tu t’inspires de quoi, toi ?

Gilles Feuermann : Je fais énormément de veille, c’est hyper important dans mon métier, parce que le graphisme change tout le temps. C’est pas évident de se dire ‘on va faire quelque chose de nouveau’ alors que tout a déjà été fait.

Florian Daguin : Il y a copie et copie. En architecture, si tu copies vraiment, ça se voit.

Gilles Feuermann : Je parlerais plutôt d’inspirations, de tendances. Tu t’en inspires mais tu as toujours ta touche à ajouter.

Florian Daguin : Tant qu’il y a une réflexion derrière ton inspiration, ce n’est pas vraiment de la copie.

Gilles Feuermann : Et tu as le brief du client, aussi. C’est le vrai boulot d’un directeur artistique ou d’un architecte que d’orienter diplomatiquement le client et de lui dire que l’on ne va pas faire la même chose et qu’on est là pour en inventer de nouvelles.

Florian Daguin : En architecture, t’as plus des concepts qui se font copier, mais je trouve ça valorisant.

Gilles Feuermann : Complètement. Ecoute, je suis content, j’ai trouvé ça super intéressant d’échanger avec toi, parce que le métier d’architecte, j’avais la vision d’un mec sur un plan en train de dessiner au fusain, alors que pas du tout, en fait !

Florian Daguin : Haha en effet, c’est loin d’être ainsi ! Oui, moi aussi, et ce que j’ai trouvé intéressant, c’est qu’au-delà de notre similitude physique, ce sont toutes les similitudes dans les profils, même si on ne fait pas le même métier.

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Propos recueillis par Séphora Talmud. Photos prises par Elodie Daguin.